Pourquoi les profs font grève

Par Noria Ait-Kheddache, publié le 18/02/2010 à 15:00 - mis à jour le 19/02/2010 à 13:01

Les enseignants des académies de Paris, Créteil et de Versailles sont appelés à faire grève ce jeudi. Mais pour protester contre quoi? Revue de leurs revendications..

Insécurité, manque de surveillants, réforme du lycée bancale... Les enseignants des académies de Paris et de Versailles descendent dans la rue ce jeudi pour exprimer leur ras-le-bol. Quelles sont leurs recommandations?

Qui manifeste?

Sont au rendez-vous ce jeudi les syndicats enseignants : CGT-Educ'action, CNT-Education, FIDL, SN-FO-LC, SNEP, SNES et SUD-Education.

Plus de recrutements

Enseignants, conseillers principal d'éducation, conseillers d'orientation et psychologues manquent cruellement dans les établissements scolaires. De plus, 30 000 postes d'enseignants ont été supprimés entre 2007 et 2009. 16 000 suppressions sont prévues en 2010, conséquence du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux parti à la retraite.

"Nous voulons plus de psy, d'infirmières, d'assistants sociaux. Ces postes sont en voie de disparition, déplore Nicole Hénache, secrétaire nationale de CGT-Education. Actuellement, il n'y a même pas une infirmière par établissement, mais plutôt une pour trois, et un médecin pour environ 5000 élèves", rappelle le syndicat.

En 20 ans, le nombre de surveillants est passé de 20 à 11 au lycée 
Adolphe Chérioux.

Laurence Debril/LEXPRESS

En 20 ans, le nombre de surveillants est passé de 20 à 11 au lycée Adolphe Chérioux.

"Il y a fort turnover, étaye CGT-Education. Les contrats de ces aide-éducation (surveillants) est de un an non-renouvelable, ce qui empêche les équipes de s'installer réellement dans un établisssement scolaire, pour mieux connaître les élèves et cerner leurs difficultés".

Eviter une trop forte sanctuarisation de l'école

- Le ministère veut implanter des portiques de sécurité. Une mesure accueillie favorablement par les parents d'élèves mais décriée par le personnel éducatif qui dénonce la création d'un climat pesant. Le contrôle de chaque élève retarderait également le début des cours.

- Les fouilles des cartables, également envisagées par le ministère, ont aussi leurs limites. Si agents de surveillance et chefs d'établissement demandent aux élèves d'ouvrir leur sac, ils ne peuvent pas les fouiller.

D'après la secrétaire nationale CGT-Education, ces solutions ne sont pas une fin en soi: "Les trois lycées dans lesquels se sont déroulés les agressions de ces dernières semaines disposaient de ces équipements de sécurité."

La solution des EMS

L'académie de Créteil compte sur les équipes mobiles de sécurité (EMS) pour limiter la violence à l'école. Comprenant 50 personnes, (le recrutement se poursuit encore), elles sont réparties en 4 équipes, une par département. Le volet sécurité est géré par d'anciens militaires ou gendarmes. Celui de l'accompagement et de l'orientation des élèves, par des psychologues, des conseillers d'éducation et des enseignants.

Lutter contre les intrusions dans les établissements

Pour Nicole Hénache, à Créteil et Versailles, le mécontentement est focalisé sur la violence et les intrusions dans les établissements scolaires. Les enseignants réclament du personnel formé à ces événements.

Selon l'académie de Créteil, c'est le rôle des EMS (voir ci-contre) d'aider à sécuriser davantage les établissements scolaires. "Même s'ils sont incapables de prévoir toutes les intrusions, certains incidents ont déjà pu être évités de par leur travail en amont".

Limiter le nombre d'élèves en seconde

Limiter à 30 élèves maximum les capacités d'accueil des classes de seconde. "Des classes surchargées ne permettent pas un apprentissage dans les meilleures conditions" rappelle CGT-Education.

La titularisation des contractuels

Les syndicats reprochent au gouvernement d'augmenter sans cesse le nombre d'enseignants non titulaires. Selon CGT Education, les contractuels seraient près de 3000 dans l'académie de Créteil en janvier 2010.

La réforme de la formation des maîtres

La réforme prévoit le recrutement des futurs enseignants après l'obtention d'un master universitaire (bac+5) et supprime l'année rémunérée de fonctionnaire stagiaire, remplacée par des stages pendant le master.

Les syndicats craignent que les nouveaux titulaires soient astreints à un service à temps plein dès la rentrée. Ils évoquent le "bricolage" que nécessitera leur remplacement pendant qu'ils seront en stage.

Les syndicats s'opposent au principe de donner à des stagiaires de l'IUFM, pendant 12 à 18 heures par semaine, la charge de plusieurs classes. D'après eux, les futurs titulaires ne peuvent pas gérer ce flot de travail.

La réforme des lycées

Ses objectifs sont de permettre des réorientations jusqu'en 1ère, de revaloriser la filière littéraire, spécialiser les terminales pour mieux préparer les lycéens à l'enseignement supérieur, tout en créant deux heures par semaine d'"accompagnement personnalisé".
Les organisations de l'Education sont partagées. Les détracteurs dénoncent les diminutions d'horaires de certaines disciplines (comme l'histoire pour les scientifiques), l'autonomie des établissements et une réforme "faite pour supprimer des postes".

Les syndicats enseignants demandent le retrait de la réforme des lycées. En cause :

- Le collège serait le grand oublié de cette réforme, pourtant passerelle entre le primaire et le lycée.

- Il y aurait moins de travail en classe pour les élèves.

- Certains postes d'enseignants pourraient disparaître.

- La charge d'élèves par classe serait encore plus importante.

- Les voix technologiques verraient leur existence menacée.